Vocabulaire du droit : faire pencher la balance côté français

À l’ère du numérique, les anglicismes se faufilent facilement dans le langage juridique, à l’image des données et informations qui circulent et que des pirates sont susceptibles de nous dérober. Les experts ont donc élaboré une liste de termes français dont la plupart concernent des usages malveillants de l’informatique, publiés par la Commission d’enrichissement de la langue française au Journal officiel du 24 février 2023.

 

Ces nouveaux termes traitent de cyberattaques, d’atteinte à la vie privée, mais aussi du droit comme discipline et pratique.

 

Des identifiants convoités

Un premier type de cyberattaque, le cassage de mot de passe, consiste à tester systématiquement toutes les combinaisons de caractères possibles afin de trouver un mot de passe ou une clé de chiffrement. La Commission déconseille le calque de l’anglais « attaque par force brute » (brute force attack, bruteforce attack) : cette expression peu explicite, dans laquelle la référence essentielle au mot de passe fait défaut, pourrait recouvrir d’autres réalités.

Les pirates peuvent également tenter d’accéder à des comptes en ligne par envoi massif d’identifiants (credential stuffing attack), grâce à des noms d’utilisateur et des mots de passe obtenus le plus souvent dans l’internet clandestin. Quand cet envoi massif d’identifiants a pour objectif de saturer un serveur, il est assimilable à une attaque par interruption de service.

 

La vie privée menacée

Les données relatives à notre vie privée sont en effet à la merci des logiciels traqueurs (spouseware, stalkerware, trackware), tandis que des informations confidentielles telles que les numéros de cartes de crédit peuvent être récupérées via le hameçonnage par texto, qui suscite moins la méfiance des destinataires que les courriels frauduleux.

Par ailleurs, nous ne sommes pas à l’abri d’une divulgation malveillante d’informations personnelles (doxing) – par exemple sur notre situation financière ou sociale –, qui nous expose à un risque même si ces données ne sont pas confidentielles à proprement parler.

Deux autres pratiques concernent en revanche l’intimité de leurs victimes. Forgé pour remplacer l’anglicisme upskirting, le mot-valise photovoyeurisme permet de gagner en précision en spécifiant qu’il s’agit bien de voler des images. Quant au terme chantage sexuel, il se substitue à sextortion (ou sexual extortion) : l’anglais privilégie la référence au but poursuivi, à savoir l’extorsion, mais celle-ci visant des objets divers, la Commission a choisi de mettre en avant la menace en jeu (menace de pornodivulgation, en l’occurrence).

 

Le recours au droit à bon et mauvais escient

Enfin, les experts ont élaboré trois termes évoquant des concepts plus généraux.

La locution guerre juridique vient traduire le terme lawfare, dont il reprend de façon plus explicite l’idée de « faire la guerre » (warfare). La procédure-bâillon est un exemple de guerre juridique.

Quant aux structures où des étudiants juristes offrent des consultations juridiques gratuites sous la supervision d’enseignants ou de praticiens (law clinic, legal clinic), elles reçoivent deux appellations : clinique juridique, qui est en usage, et centre d’assistance juridique universitaire, locution plus explicite et descriptive, que l’on pourra abréger en CAJU.

Terminons avec un concept qui ne correspond pas à un anglicisme mais qu’il s’avérait utile de définir : la légistique, terme bien connu des milieux professionnels et universitaires.

 

Grâce à FranceTerme, nul n’est censé ignorer les définitions de ces concepts... consultez-les en cliquant sur les liens !