1. Philippe Bolusset, qui êtes-vous et quel est votre rôle au sein du dispositif d’enrichissement de la langue française (DELF) ?
Je suis germaniste de formation, diplômé de Paris IV et de l'ISIT. J'ai aussi étudié avec une grande délectation le chinois et la civilisation chinoise à l'INALCO. Au sein d'Afnor, je traduis et révise des documents normatifs qui nécessitent de fréquentes mises à jour ; mon activité a donc largement bénéficié des apports de la traduction assistée par ordinateur. Désormais, nous expérimentons aussi des outils de traduction automatique couplés à l'IA.
Au sein du DELF, je représente Afnor qui est membre de droit du dispositif et j'assiste aux réunions mensuelles de la CELF ; j'assure une veille terminologique afin d'éviter les incohérences entre des termes utilisés ou en discussion en normalisation et les termes du dispositif. Je suis le contact pour les correspondants normalisation issus d'Afnor ou des bureaux de normalisation, un pour chacun des collèges du dispositif.
2. Quels liens peut-on faire entre le travail du dispositif et celui de l’AFNOR ?
Afnor accorde une grande importance à la défense du français en tant que langue de communication technique et scientifique ; même si la langue de travail de la normalisation est l'anglais, il doit rester possible de tout décrire en français. La terminologie est essentielle et chaque norme contient normalement un article "termes et définitions" ; à l'IEC (la commission électrotechnique internationale), le TC 1 est un comité technique qui lui est entièrement consacré. Néanmoins, certains cèdent à la facilité, parfois à une forme de snobisme, en gardant des termes anglais au lieu d'utiliser des termes français ; les traducteurs internes d'Afnor s'efforcent de promouvoir les termes français, dont ceux issus du DELF. Le travail des commissions de normalisation avec leurs experts et les examens successifs aux différentes étapes d'un document est très proche de l'organisation du DELF avec ses collèges et ses différentes lectures.
3. Qu’appréciez-vous particulièrement dans le DELF (dans son fonctionnement, sa composition…) ? Qu’est ce qui pourrait être amélioré ?
J'apprécie particulièrement la qualité des apports des experts pour expliquer les notions et la grande variété des domaines abordés. Les demandes d'éclaircissements et de reformulations me semblent indispensables pour une bonne compréhension des définitions par le grand public même si elles alourdissent les discussions. Le fonctionnement rodé du dispositif et la compétence de l’équipe de la mission d'enrichissement de la langue française permettent de traiter des listes parfois très longues qui pourraient être scindées. Si un terme est déjà présent dans les dictionnaires d'usage courant, l'étudier au sein du dispositif pour ajouter une définition supplémentaire ne me semble pas participer à l'enrichissement de la langue. Pour moi, la priorité doit être donnée aux termes concurrencés par un terme étranger ou relevant d'innovations. On peut regretter le faible nombre de néologismes créés mais le français n'est pas aussi souple et imagé que l'anglais ; par ailleurs, la promotion des termes du dispositif reste difficile même lorsque la proposition est très bonne, « infox » par exemple.

