3 questions à Odile Palut-Laurent

Odile Palut-Laurent, qui êtes-vous et quel est votre rôle au sein du dispositif d’enrichissement de la langue française (DELF) ?

Après un Doctorat en géologie, j’ai débuté ma carrière comme ingénieur chercheur dans la gestion des déchets radioactifs, puis dans le domaine de la sûreté nucléaire en tant qu’exploitant d’installations nucléaires de base ou au sein de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Au sein du DELF et depuis plus de 10 ans, j’appartiens au groupe d’experts permanents nommés auprès du collège de l’énergie nucléaire en tant que membre du groupe de travail relatif au combustible. Cela comprend le cycle du combustible, les transports et les déchets ainsi que les aspects sûreté liés à ces thèmes. Je contribue à définir le plus simplement possible le langage nucléaire.

 

Qu’est-ce que le DELF apporte au secteur du nucléaire ?

A l’heure d’internet et de l’intelligence artificielle, il est essentiel de disposer d’une base de données fiable comme France terme.

Pour débattre sur le nucléaire, il faut en comprendre les expressions. C’est particulièrement prégnant avec le réchauffement climatique et le renouveau du nucléaire. Le DELF contribue à apporter un langage qui soit d’abord commun à tous les acteurs du nucléaire (exploitants, autorités de sûreté, experts, association) et qui reste compréhensible par chacun, quel que soit son âge, sa profession, son niveau d’étude.

En outre, lorsqu’une nouvelle technologie se développe, le risque d’anglicisme est important.  Le DELF est une première réponse. Conserver une terminologie française contribue à renforcer le niveau de rayonnement du pays à l’international. Lors du développement des réacteurs nucléaires dans les années 70 et suivantes, les abréviations des réacteurs utilisées étaient en français : « REP » (réacteur à eau sous pression) ou « RNR » (réacteur à neutron rapide). Qu’en sera-t-il des petits réacteurs modulaires, « PRM » ou « SMR » (small modular reactor) ?

 

Qu’est-ce que le dispositif vous apporte personnellement ?

C’est une expérience passionnante. Les examens de la Commission d'enrichissement de la langue française ainsi que les avis de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France et de l’Académie française sont éclairés vis-vis de l’usage de la langue française mais parfois surprenants pour des experts du nucléaire, habitués à leur jargon professionnel. Cela suppose une fusion des cultures entre scientifique et littéraire et c’est ce que j’apprécie. Cela vous réapprend aussi à prendre le temps. Entre la validation d’une définition au sein du groupe des experts du nucléaire et sa publication au Journal officiel, plusieurs années peuvent s’écouler et nécessiter de nombreux allers retours au sein du DELF. C’est surprenant mais c’est aussi la garantie d’une définition robuste et pérenne.