La Commission d’enrichissement de la langue française vient de publier au Journal officiel plusieurs termes du street art (« art urbain »), proposés par le collège de terminologie du ministère de la Culture. Le street art est à distinguer des arts de la rue, qui correspondent plus spécifiquement aux arts vivants qui prennent place dans la rue. La principale technique de l’art urbain est le « graffiti », terme défini et présent, tout comme le terme « tag », dans les dictionnaires de langue courante, avec les termes « graffeur », « graffe », etc. Street art est très répandu dans notre langue et devrait rester sous forme d’anglicisme lorsque, à l’instar des termes Arte povera, Art déco ou Modern art, il désigne un mouvement historique, en l’occurrence ici celui qui est né dans les années 1960 aux États-Unis.
Lorsque des graffeurs collaborent ou partagent la même approche, les experts proposent de nommer leur groupe un collectif (crew en anglais), terme en cours dans d’autres pratiques et disciplines artistiques. Parfois, les initiales d’un collectif figurent à côté de la griffe – en anglais hand style – signature ou style calligraphique propre à un graffeur.
Dans le milieu très anglicisé du street art, le graffeur inexpérimenté ou qui se montre malveillant à l’égard de ses pairs, par exemple en recouvrant un graffiti existant, est vite taxé de toy. À partir du substantif, les graffeurs ont même créé une forme verbale que l’on peut lire dans la littérature professionnelle : « il s’est fait toyer ». En proposant l’équivalent gâcheur, le collège de terminologie du ministère de la Culture a ménagé la possibilité de dire dorénavant en termes clairs et transparents qu’un « gâcheur s’est fait gâcher »…
Parmi les artistes de l’art urbain, celui qui pratique le collage est appelé collagiste en français (en anglais collagist).
Une autre forme d’art urbain consiste à réaliser des œuvres, des installations ou des performances avec du ruban (adhésif, velours ou autre). On peut tout simplement dire en français : « art du ruban » ; en anglais tape art.
Lorsqu’un artiste a recours à l’écriture calligraphique, il désigne cette technique – et par extension l’œuvre-même – en employant le terme faussement italien : calligraffiti. La Commission d’enrichissement de la langue française a préféré proposer en entrée principale le terme plus clair de graffiti calligraphié et en synonyme calligraffiti qui est très employé (il prend la marque du pluriel des mots français : calligraffitis).
Autres techniques : le tag au laser (en anglais lasertag, lasertagging), tag éphémère réalisé au moyen de faisceaux lumineux, et le tricot urbain (en anglais urban knitting, yarn bombing) qui consiste à habiller de pièces tricotées ou crochetées des éléments du mobilier et du paysage urbains.
De surprenants graffitis sont créés en creusant, grattant ou incisant une surface ; très couramment aujourd’hui les artistes désignent cette technique – et par extension l’œuvre ainsi créée – en anglais : ils emploient le terme scratching. On peut dorénavant le dire en français en employant un terme attesté depuis le xviie siècle dans les dictionnaires : sgraffite, qui provient de l’italien sgraffito signifiant « égratigné ». On trouve aussi le terme « sgraffiti » (pluriel : sgraffitis).
Enfin, comme le street art n’entre dans aucune des cases que l’on souhaiterait lui assigner, le terme dégraffittage (buffing en anglais) – qui désigne le geste qui consiste à effacer ou à recouvrir des graffitis ou d’autres types d’inscription murale sans dégrader leur support – s’applique aussi bien aux services de voirie qu’aux artistes qui font naître sur les murs de nos villes des œuvres très prisées.