Devantures et boutiques à Paris

Conséquence de l’embellie économique qui marque le XIXe siècle, le nombre de boutiques s’accroît et la devanture en devient une sorte de quintessence.Au début des années 1970, la disparition progressive du Paris commerçant du XIXe siècle s’accélère, les habitudes changent, les mesures d’hygiène deviennent draconiennes, obligeant certaines boutiques à se transformer. Les grandes enseignes concurrencent les magasins d’alimentation, les commerces traditionnels comme les crémeries ou les boucheries chevalines sont en déclin. Seules les boulangeries-pâtisseries résistent.   Lors de la destruction des Halles de Baltard, un certain nombre de décors de boutiques a été déposé au Musée des Arts et Traditions populaire qui organise une exposition sur ce thème en 1977.  Ce musée, pionnier dès l’Après-Guerre avec l’enquête photographique de Pierre Soulier entre 1945 et 1950, lance une nouvelle campagne qui sera menée par Claude Faivre de 1966 à 1976 (accéder à la base PHOCEM, à propos des enquêtes photographiques de Pierre Soulier et de Claude Faivre entre 1945-1950 et 1966-1976).   En même temps, un inventaire des boutiques anciennes, dressé à partir de 1973 par l’architecte Gilles-Henri Bailly est publié. Agnès Varda tourne Daguerréotypes en 1975 et les associations de défense du patrimoine attirent l’attention des pouvoirs publics.Le Ministère de la Culture engage alors une démarche de valorisation et de conservation de ce patrimoine souvent négligé. Il souhaite éveiller l’intérêt des commerçants pour les décors encore en place et permettre leur conservation in situ.   Dans le cadre des campagnes de protection thématiques engagées à cette date, la Direction régionale d’Ile-de-France poursuit un travail d’inventaire des devantures et des boutiques à Paris en liaison avec le Musée des Arts et Traditions populaires. Une centaine de dossiers de boutiques et de devantures particulièrement représentatives est retenue et le Ministère de la Culture inscrit au titre des monuments historiques, le 23 mai 1984, 112 boutiques.   L’arrêté porte sur l’ensemble des arrondissements parisiens et sur une sélection de décors représentatifs du plus grand nombre d’activités commerciales et quelquefois de métiers alors en voie de disparition (on dénombre 1 bougnat, 3 boucheries chevalines, 1 chapellerie et 12 crèmeries).La protection au titre des monuments historiques a permis de tenir compte de nombreux styles techniques et des différents matériaux employés dans la réalisation des boutiques (bois, céramique, fixés sous verre, marbre et métal).Le souci d’assurer une grande représentativité des décorations de boutiques a orienté le choix vers la protection des devantures à grilles du XVIIIe siècle, des boutiques du XIXe siècle ainsi que des décors plus récents peu pris en compte à cette période des années 1980.   Cette protection a également permis de compléter celle des devantures plus anciennes distinguées dès 1925 : les boutiques des marchands de vins de la fin du XVIIIe siècle dotés de grilles en fer forgé décorées avec raffinement (Paris 4e arr. 1, quai de Bourbon) ou d’autres boutiques à coffrages de bois du tout début du XIXe siècle (Paris 3e arr. 77, rue Vieille du Temple).Notons aussi les campagnes photographiques inestimables menées, avant 1930,  par Edouard. Desprez pour le Casier archéologique de la Ville de Paris et du Ministère des Beaux-Arts, celles des frères Séeberger et de Thérèse Bonney (1894-1978) léguées aux Archives photographiques de la Médiathèque du Patrimoine ; sans oublier celles des photographes du service des monuments historiques comme Médéric Mieusement (1840-1905) et Michel Arouimi, ni les photographies de Felipe Ferré acquises récemment par le musée Carnavalet.   Quarante ans plus tard, un recensement et une couverture photographique des boutiques et devantures protégées au titre des monuments historiques a permis de voir l’évolution de ces boutiques et d’accompagner leurs propriétaires dans la restauration de leur commerce.